Lisez-vous le belge ? #2
C’est devenu une tradition : chaque année au mois de novembre, l’opération « Lisez-vous le belge ? » met en lumière la littérature belge francophone.
Partenaires de cette opération, Passa Porta propose d’interroger la destinée de la littérature belge hors de ses frontières. « Lisez-vous le belge ? Et quel est votre livre belge préféré ? » : nous avons posé la question à des traducteurices littéraires qui sont la voix de livres belges à l’étranger.
Voici leurs -parfois étonnantes- réponses. Venues du Bélarus, du Brésil, d’Italie et d’Australie.
“Chez Krull” de George Simenon, choix de simona mambrini, traductrice du français vers l’italien :
« Il me serait impossible de choisir un seul livre de la littérature belge que j’aime. Mais un seul auteur, oui. Et cet auteur, c’est Georges Simenon, un des grands écrivains du XXème siècle et le romancier de langue française le plus vendu, traduit et adapté de son siècle. Simenon est un romancier absolu, son engagement consiste à décrire l’homme nu. Par son écriture, il parvient à faire ressortir l’humanité dans toutes ses dimensions. Ouvrez n’importe quel livre de cet écrivain de génie et vous serez aussitôt happé par ses atmosphères, ses personnages, ses petites histoires qui poussent l’homme au bout de lui-même, à la rencontre de sa destinée. Pour commencer : Chez Krull, 1938. »
« Mahmoud ou la montée des eaux » d’Antoine Wauters, choix de stéphanie smee, traductrice du français vers l’anglais (Australie) :
« Je sais bien où je me trouvais quand j’ai lu Mahmoud ou la montée des eaux d’Antoine Wauters (Verdier, 2021) pour la première fois… et ce n’est pas toujours le cas! Je m’étais réfugiée dans une chambre assombrie en pleine canicule en Provence, fuyant ma famille en-Covidée. La lecture m’a déchirée. It broke me. C’est un poème en prose qui décrit avec une empathie étonnante la vie d’un vieil homme syrien qui a tout perdu, mais le cadre du récit s’étend bien au-delà des frontières d’un seul pays ravagé par la guerre; c’est aussi une plaidoirie pour le pouvoir de la littérature d’agir en tant que rempart face aux horreurs d’un monde inexplicable, en tant que fortification de notre humanité. Je savais que je ferais de mon mieux pour faire connaître ce texte aux lecteur.ices anglophones. Selon l’auteur lui-même, dans un entretien accordé à Diacritik: L’écriture chasse et entretient la douleur. Elle aide à vivre et elle vous tue. C’est une chose ambiguë. … Je voulais inventer un récit en marge de celui des médias, qui créerait de l’humanité et de l’empathie. La manière dont on nous raconte le monde est cruciale, et … c’est pour ça que la littérature doit proposer ses contre-récits. D’autres mots, pour faire sentir les choses autrement. Trust me, this book will break you too.”