portraits en lecteurs (IV) : Roselien, itinéraires de quais en scènes

11.12.2018
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La lumineuse auteure-compositrice-interprète Roselien balade sa guitare, ses rêves et ses petits airs d’éternelle adolescente entre Leuven, sa ville de cœur, Bruxelles, sa ville d’adoption, et Londres, où elle a récemment déposé sa valise. Avec en poche un master en théâtre et un bachelor en production musicale, Roselien trace sa route et son destin, de studios en salles de concerts, au rythme des trains qu’elle emprunte comme autant de bulles d’inspiration. Rendez-vous quai numéro 3, Gare Centrale.

Roselien compose depuis l’âge de 12 ans. Elle fait voyager ses chansons entre influences jazz, soul, R&B, électro-funk et hip hop, tout en évitant l’écueil du copier-coller néo soul. A mille lieues du bling bling à l’américaine, la jeune pousse pose son grain de voix sur des compositions inspirées par sa quête du bonheur et sur des productions alliant groove, légèreté et virtuosité. Côté scène, Roselien adore partager son énergie communicative et ses bonnes vibrations. Un talent authentique et une personnalité tout en élégance qui lui ont valu de chanter en ouverture de pointures telles que Gregory Porter, Meshell Ndegeocello, Luka Bloom ou encore Anthony Joseph.

Moments inspirants autour d’un thé parfumé, saupoudrés avec grâce sur un dimanche automnal finalement pas si sombre.

- Un endroit pour lire dans Bruxelles ?

Etudiante, j’ai énormément lu dans les gares, en attendant des trains pour Gand puis pour Anvers. Maintenant, je suis souvent entre Leuven, Bruxelles et Londres. Donc j’attends encore et encore des trains. J’aime aussi profiter du soleil, lire et regarder passer les gens à la terrasse de La Clef d’Or, place du Jeu de Balle, un café typique des Marolles. Je vais parfois lire dans le Parc Egmont, un peu caché au-dessus du Sablon. Et je rêve d’aller me poser au Musée Alice et David van Buuren. Ce couple de mécènes a décoré sa maison avec toutes ses œuvres d’art. Je m’imagine bien lire dans le labyrinthe de leur incroyable parc...

- Un endroit favori pour acheter un livre à Bruxelles ?

Mon père est né à Bruxelles. Quand j’étais petite, il nous emmenait à la librairie Saint-Hubert, dans la Galerie du Roi*. On y trouvait surtout des livres d’art et j’étais fascinée par ces peintures et ces dessins formidables. Plus récemment, j’ai découvert le Filigranes Corner. Je me sens quelquefois perdue dans les grandes librairies et là, j’aime beaucoup l’idée des « coups de cœur des libraires ». Et puis la Solvay Library, est sublime, mais je crois qu’on peut seulement y admirer les livres et l’architecture.

- Un endroit pour vivre la littérature à Bruxelles ?

Dans mes textes et sur scène ! Plus sérieusement, je n’ai pas tellement d’amis qui lisent les mêmes bouquins que moi, ou alors nos discussions ne sont pas liées à des lieux. Plutôt à nos aspirations, à nos questionnements sur la vie. J’aime d’ailleurs beaucoup les livres que j’appelle « spirituels », comme ceux de Deepak Chopra, Eckhart Tolle ou Alain de Botton.

Je suis surtout émue par les livres de personnalités inspirantes. Maya Angelou me touche énormément. Dans son roman autobiographique I Know Why the Caged Bird Sings, elle raconte avec beaucoup de sensibilité ses jeunes années d’Afro-américaine dans l’Amérique ségrégationniste. Comment sa force de caractère et son amour pour l’écriture l’ont aidée à assumer sa double peine d’être femme ET noire. J’ai mis en musique son poème Phenomenal Woman, que j’adore chanter en live. Ce texte m’inspire, tout comme les paroles d’Erykah Badu, parce qu’ils parlent des émotions sans filtre. J’ai aussi pris une claque en lisant l’autobiographie de Petra De Sutter. Spécialiste belge de la médecine reproductive, internationalement reconnue, sénatrice Groen et transgenre, elle a fait son coming out à 40 ans, et elle assure.

J’aime me connecter à ces parcours incroyables. Ils me font un bien fou quand je me sens seule au monde ou incomprise dans ma démarche artistique.

Livres cités

  • Maya Angelou, I Know Why the Caged Bird Sings (1969), publié en français sous le titre Je sais pourquoi l'oiseau chante en cage, traduit par Philippe Bonnet et Dominique Lemann, Hachette (1980).
  • Maya Angelou, Phenomenal Woman: Four Poems for Women (1995).
  • Petra De Sutter & Elke Lahousse, Overleven: mijn strijd als transvrouw, arts & politica, Manteau (2015).

* Pour en savoir plus sur la librairie d’art Saint-Hubert et son propriétaire, aujourd’hui tous deux disparus, lisez le magnifique roman Dans la maison un grand cerf de Caroline Lamarche (Gallimard).

photo © pascal schyns

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11.12.2018