courage (19) marie desplechin
En ces temps troubles, nous avons demandé à des autrices et auteurs que nous admirons ce que la notion de courage leur inspirait. Souvenir, micro-histoire, anecdote ou réflexion plus métaphysique : ils sont nombreux à nous avoir répondu. Voici le dernier épisode de ce feuilleton.
Le courage n’existe pas à l’état inerte. Il se manifeste. Il ressemblerait plutôt en cela à un éblouissement. Aussi est-il inutile de spéculer sur des réserves dans lesquelles nous pourrions puiser. Le moment vient toujours assez tôt de savoir de quel courage nous saurons faire preuve, et en quelle quantité. Ce sont des moments que personne n’appelle, et que nous nous efforçons — le plus souvent — de fuir, en vain.
La peur, la douleur, la fureur font partie du séjour (all inclusive) de l’existence. C’est dans la surprise indignée qu’elles nous infligent, quand nous sommes désarmé.e.s, vulnérables, nu.e.s et ramené.e.s à notre faiblesse, que surgit le courage. Il naît d’un mélange aérien de réflexes très anciens, et prend la forme soudaine d’un chien. Vous ignoriez son existence et voilà qu’il est là, et qu’il gronde face à l’ennemi.
Voyez comme il méprise la valeur du passé, la crainte de l’avenir, voyez comme il aboie maintenant. Défendez-vous comme il vous défend. Devenez le chien. Oh, il ne faut pas vous attendre à une victoire, ce n’est pas ça. On a vu plus d’un chien terrassé. Mais il y a plus grand que la victoire.
Marie Desplechin (1959) a écrit beaucoup de livres pour enfants (Séraphine, Verte, Le Journal d’Aurore) et pour adultes. Prix Médicis 2005 pour La Vie sauve, elle est distinguée en 2020 par la Grande Ourse du Salon du Livre Jeunesse de Montreuil. Elle travaille régulièrement comme journaliste et participe à l'écriture de scénarios de films. Elle vit à Paris.
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