Avis à la population (9) Chute

Wilfried N’Sondé
16.04.2020
Texte d’auteur
Ty Williams Ptfqed E A1 E Unsplash

Les virologues conseillent actuellement la « distanciation sociale » alors que Passa Porta via ses rencontres littéraires vise le « rapprochement social ». Passa Porta tient à maintenir le contact entre auteurs et lecteurs et c'est pourquoi, dans les semaines à venir, nous donnerons la parole à une sélection d'écrivains belges et internationaux, à qui nous avons demandé de rédiger un « Avis à la population » personnel en direct de leur bureau.

Né à Brazzaville, Wilfried N’Sondé a longtemps vécu à Berlin avant de rejoindre Paris, d’où il nous écrit. Nous avions eu le plaisir de l’accueillir à Bruxelles lors de la sortie de Un océan, deux mers, trois continents, un formidable roman d’aventures particulièrement recommandé en ces temps confinés. Il nous livre cette fois un délicat poème.

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Chute

Délices et douceur aux premiers jours monotones,
Lascives coulèrent les heures, sommeil lourd, rires d’enfants.
A nos âmes confinées, le repos fut un chant
Du cygne, sinistre, comme un orage tonne.

Un matin funeste nous basculâmes dans l’atroce.
L’infection, mauvais augure d’une fin précoce,
Déserta nos écrans, pour peupler notre lit…
A l’aube de fièvre elle tremblait, affaiblie.

Le temps se compte alors en des quintes de toux,
S’égrène en pointillés d’un décompte qui rend fou,
Vers l’abîme, le gouffre, qui prélude l’absence.

Elle partit, sereine, au crépuscule de l’angoisse,
En priant que la nuit davantage ne défasse.
L’aurore tarde à briller… en nous le mal avance.


Wilfried N’Sondé, avril 2020

Wilfried N’Sondé
16.04.2020