Horacio Castellanos Moya
Écrivain apatride ayant vécu dans le monde entier, Horacio Castellanos Moya a emmené partout avec lui le Salvador, qu’il a quitté au moment de la guerre civile. Il manie avec brio les monologues intérieurs et l’oralité, instruments narratifs privilégiés pour rendre compte de l’enfermement des exilés et montrer ce que font, même de loin, la violence et la guerre civile.
Moronga, une fiction située aux Etats-Unis : une première pour Moya
Dans Moronga, son dernier roman récemment paru en français, Castellanos Moya se livre à une critique au vitriol des Etats-Unis obsédés par la sécurité et la télé-surveillance, un thème qui fait écho à la paranoïa d’Erasmo Arágon, un professeur d’université qui, avec le chauffeur de bus José Zeledón, est l’un des protagonistes principaux du livre. Construit sous forme de diptyque, le roman montre comment la violence qui a secoué l’Amérique centrale dans les années 1970-80 s’est transposée et a muté aux Etats-Unis.
Un écrivain apatride
Né en 1957 au Honduras, il part vivre au Salvador à l’âge de quatre ans. Il y demeure jusqu’à vingt et un ans, puis le quitte au début de la guerre civile, pour embrasser une carrière de journaliste pour une agence salvadorienne. Il vit successivement en Amérique centrale, au Canada, au Mexique, en Allemagne, en Suisse, en Espagne, au Japon, revient quelques temps au Salvador au début des années 1990 où il dirige Primera Plana, le premier journal d’après guerre civile, avant de s’établir en 2004 aux Etats-Unis. Il a reçu en 2014 le Prix hispano-américain du roman Manuel Rojas, couronnant l’ensemble de sa carrière, et enseigne aujourd’hui l’écriture créative dans l’université de l’Iowa. Sa reconnaissance est internationale.
Le Céline d’Amérique centrale ?
La violence et la guerre civile sont les grands sujets de ses douze livres qui ont l’efficacité formelle des grands romans noirs. Son humour féroce, son flow et sa rage perpétuelle l’ont parfois fait comparer à Céline. Mais dans son parcours, aucune compromission avec le pouvoir. Au contraire, Castellanos Moya n’a de cesse que de dénoncer la corruption généralisée et le crime organisé qui minent l’Amérique centrale.
Une œuvre comme une cathédrale
Qu’il se livre à un exercice d’imitation de Thomas Bernhard dans Le dégoût, un roman en forme de monologue qui lui a valu des menaces de mort, ou qu’il campe les personnages paranoïaques, atteints de procrastination et un peu fous dont il a le secret (notamment dans le cycle narratif où l’on retrouve la famille Arágon, dont on suit le destin sur plusieurs générations au Salvador, avant et après la guerre civile), Castellanos Moya aime entrer au plus profond du conflit que vivent les hommes et montrer la complexité de l’âme humaine.
Photo © Ivan Giménez Tusquets Editores
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